THE ROLLING STONES : « Blue & Lonesome »
C’est le 23 éme album des Rolling Stones, le premier depuis l’excellent « A Bigger Bang » de 2005 et surtout, leur toute première galette vouée au culte du blues depuis… leurs débuts en 1964 ! « Blue & Lonesome », comme son nom l’indique, est dédié à ce spleen sonique popularisé par le label Chess et sa bonne ville de Chicago…et à son corolaire obligé : la déprime amoureuse. C’est également le tout premier album de la bande Jagger-Richards constitué exclusivement de reprises. Vertigineusement capturées en seulement TROIS JOURS, ces précieuses « chansons bleues » n’ont décidément pas fini de nous faire tirer la langue. 😉
En 1960, lorsque Jagger et Richards se retrouvent sur le quai de gare de leur bonne ville de Dartford, Kent à trente bornes à l’est de Londres c’est grâce aux LPs de Chuck Berry et de Muddy Waters, que Mick tenait en main, que ces deux ex-copains de classe se retrouvent soudain sur la même longueur d’onde. Vous l’aurez compris, sans cet amour partagé du blues, les Rolling Stones n’auraient sans doute jamais existé. Avec Dick Taylor, Jagger reprenait déjà Muddy Waters, Bo Diddley ou Howlin’ Wolf. Et lorsque Richards les rejoint alors, c’est pour incarner ces valeurs du blues. Après avoir assisté au fameux concert du Blues Incorporated d’Alexis Korner, au Ealing Jazz Club, ce dernier bluffé par les deux gamins va leur faire partager son expertise. Et ce blues incandescent va irradier les tout premiers titres enregistrés par les Rolling Stones. 60 ans plus tard, avec ce « Blue & Lonesome », au patronyme inspiré de la chanson de Memphis Slim, Jagger, Richards, Wood et Watts reviennent à leurs premiers amours, ce blues rauque et sauvage qui leur a servi jadis de détonateur. La boucle est ainsi bouclée avec ces douze reprises d’un blues imparable.
Comme une tornade blues
Le dépit amoureux, la rupture et la frustration en sont le solide fil conducteur. Du tout premier titre « Just Your Fool », au dernier « « I Can’t Quit You Baby », la passion aux pulsions animales se révèle bien trop souvent vénéneuse, mais constitue une irremplaçable source d’inspiration. L’amour donne des ailes, y compris aux septuagénaires. Enregistré dans le temps record de trois jours, sous la houlette de Don Was, « Blue & Lonesome » tient toutes ses fulgurantes promesses. Nous avions déjà eu un avant-gout de ce festival blues, avec une petite vidéo où l’on découvrait « Just Your Fool » qui ouvre l’album. Dans cette chanson de Buddy Johnson millésimée 54, Jagger renoue avec son amour de l’harmonica, un instrument typiquement « blues » que l’on retrouve régulièrement au fil de cet album. C’est un roc, un pic, c’est un cap. Que dis-je c’est une péninsule, voire un rouleau compresseur « Commit A Crime », la composition de Howlin’ Wolf, balaye tout sur son passage comme une tornade blues, constituant l’un des moments-choc de ce nouveau projet. Plus cool, mais aussi lancinante que douloureuse, la chanson-titre « Blue & Lonesome » est hantée par cette douleur de la rupture, déchirante comme l’harmonica du chanteur des Stones.
L’aveuglante présence de Clapton
Mais c’est avec le volcanique « All of Your Love » de Magic Sam que l’album prend véritablement son envol. Dans cette compo du plus pur style Chicago Blues, Jagger renoue avec une sensualité animale qu’on ne lui avait pas connu depuis fort longtemps. Autre temps fort du projet, « Everybody Knows A bout My Good Thing » où pour la toute première fois ever Dieu se joint aux dieux du rock : Eric Clapton himself et sa slide guitar viennent gravement réveiller ce cover de Little Johnny Taylor. Blues incandescent avec « Ride’ Em Down » ou carrément déchirant avec le bondissant « Hate To See You Go », chacun des titres de cet incroyable album porte en lui l’urgence dans laquelle il a été conçu. Stones au naturel, sans aucun artifice, ce super-juke-box blues se poursuit sur le son graveleux du « Hoo Doo Blues » de Lightin’ Smith, sensuel et poisseux comme la moiteur du delta du Mississippi. Après le « Little Rain » de Jimmy Reed, « Blue & Lonesome » s’achève sur deux compositions de Willie Dixon : « Just Like I Treat You » popularisée par Howlin’Wolf aux faux accents du « It’s All Over Now » de Bobby Womack que les Stones chantaient en 1964 et le cinglant « I Can’t Quit You Baby » légendairement boosté par l’aveuglante présence de Clapton qui clôt magistralement cet album bleu comme une orange, histoire de paraphraser Eluard. En conclusion, je ne connais pas un seul vieux con autour de moi capable de résister à la vague bleue de la bande de Jagger. Quant aux jeunes cons…ils seraient cons de passer à côté. 😉 Car avec la sexyssime présence de Kristen Stewart sur le premier clip « Ride Em’ On Down » c’est VRAIMENT Merry Xmas 2 all from the Rolling Stones et putain qu’est-ce que ça change des disques de noël !
☝️
LOL