CASSE NOISETTE À L’OPERA
« Casse-Noisette » de Rudolf Noureev, cet immense et monumental classique de la magie scintillante de la fête, fait son grand retour à l’Opéra de Paris pour perpétuer cette « magie de Noël » qui fait briller des étoiles dans les yeux de Jean Christophe Mary qui juge que cette reprise attendue des aventures fantasques de la jeune Clara se révèle telle une magnifique réussite.
Par Jean-Christophe MARY
Un soir de Noël, la jeune Clara se voit offrir un pantin inanimé, un casse-noisette. Alors qu’elle le tient dans ses bras, elle s’endort et rêve d’un univers fantasque où les jouets et les peurs prennent vie. Paru à Berlin en 1816, ce conte d’Hoffmann, maître du romantisme allemand, inspire à Marius Petipa une première version dansée en 1892. Au milieu de soldats de plomb, de rats et de poupées à la taille démesurée, le monde de l’enfance devient ballet. Les songes et cauchemars de Clara sont portés par la partition étincelante et colorée de Tchaïkovski. En 1985, Rudolf Noureev remonte le ballet à l’Opéra national de Paris dans des décors et costumes qui soulignent l’étrangeté du conte. Flocons de neige, fleurs et paysages enchantés forment le décor d’une chorégraphie éblouissante. Guidée par le pantin de bois devenu prince charmant, la jeune Clara affronte ses désirs et ses angoisses au fil d’un récit initiatique.
Depuis sa création en décembre 1892 à St Pétersbourg, « Casse-Noisette » est devenu au fil du temps un véritable symbole musical. Après neuf d’absence à l’Opéra National de Paris, le retour en scène de ce « Casse-Noisette » de Rudolf Noureev devenu depuis 1985, l’un des joyaux du répertoire du Ballet de l’Opéra national de Paris était très attendu pour Noël 2023. Et on peut déjà dire que cette reprise est une belle réussite. Le charme de cette chorégraphie très « musicale » opère de bout en bout sur les 2 actes et 11 tableaux qui nous transportent au XVIIIe à la Pompadour, époque choisie par Nicolas Georgiadis, concepteur des décors et des costumes de cette production de 1985. La rue, le salon, l’arbre de Noël, le combat le royaume des Neiges, le bal, les décors inspirés du 19eme où ces multiples personnages évoluant sur la musique enivrante de Tchaïkovski sont chaleureux et nous transporte dans une chaleureuse féérie. Et surtout dans les rôles principaux, deux artistes irradient la scène et transcendent le tout. Ce soir dans le rôle de Clara, Marine Ganio évolue sur le plateau avec un naturel désarmant. Sa technique est très assurée nous offre de belles variations dans une danse des plus naturelle et vivante qui soit à travers de belles descentes de pointes. Son jeu et sa caractérisation du personnage montrent une belle maturité.
Clara qui n’est plus vraiment une gamine, s’amuse des poupées, regarde avec nostalgie les enfants avec l’envie de les rejoindre encore un peu dans leurs jeux. Le personnage offre une vision très touchante de la pré-adolescente, toujours portée par un bonheur de danser qui irradie tout sur son passage. Marc Moreau se montre tout aussi performant. Il donne à son Drosselmeyer un ton comique bienvenu, très en verve, donnant le ton et le rythme de la soirée. Il embrasse la scène de part en part avec des diagonales complètes et investit son rôle de façon habile entre les deux visages de Drosselmeyer et du Prince. La simplicité et la facilité de son jeu, conjuguées à la légèreté de ses sauts, sa joie d’être sur cette scène et son enthousiasme à danser, tout cela transparait dans chaque variation. Et c’est un pur régal pour les yeux. Hortense Millet-Maurin (Luisa) et Antoine Kirsher (Fritz) sont de joyeux seconds rôles, dans le ton et assumant leur rôle de soliste. Les ballets qui retiennent le plus notre attention sont la Valse des Flocons, vive et réglée au cordeau, la Pastorale, délicate et technique dansée à la perfection par le trio Clara Mousseigne, Bianca Scudamore et Mathieu Contat, ainsi que cette Valse des Fleurs du 2eme acte très réussie. Décors luxuriants et costumes colorés de Nicolas Georgiadis et somptueuses lumières, tout ici concourt à la féerie. Si on vous dit que la direction d’orchestre est confiée à Andréa Quinn, ces nouvelles représentations devraient à nouveau récolter les faveurs du public. Jusqu’au 1er janvier 2024.
« Casse-Noisette » de Rudolf Noureev – Ballet de l’Opéra de Paris