BECK BOGERT AND APPICE « Live In Japan 73 » « Live In London 74 »
En 1973 la pochette simili kraft arborant leurs trois initiales BBA avait trouvé sa place dans toutes nos chambres d’ado. Logique car Beck Bogert & Appice appartenait à cette race de « super-groupes » qui fleurissait alors au cœur des 70’s constitué autour de Jeff Beck ( Yardbirds) guitare, Tim Bogert ( Vanilla Fudge) basse et Carmine Appice ( Cactus) batterie. Avec un seul LP-studio à son actif, BBA percute néanmoins durablement la légende du rock et les deux concerts légendaires de 73 et 74 du super-trio se retrouvent enfin réunis dans un coffret collector qui n’a pas laissé indifférent notre JCM.
Par Jean-Christophe MARY
Du professionnel au simple amateur du monde de la musique, tout le monde vous le dira : la fin des 60’s et le début des 70’s est l’époque bénie du rock. Si à la fin des 60’s, Cream nous donne un avant goût de ce qui va devenir le hard rock, le power trio composé par Jeff Beck (guitare, chant), Tim Bogert (chant, basse) et Carmine Appice (chant, batterie) enfonce le clou avec une mixture de blues épais, et de rock lourd à la fois puissant, crade et mélodique. Pour rappels, dès 1970, Jeff Beck envisage une association avec Tim Bogert et Carmine Appice, mais il est victime d’un accident de voiture qui empêche le projet de se concrétiser. Bogert et Appice, qui avaient été préalablement membres de Vanilla Fudge forment alors le groupe Cactus autour de Jim McCarty (guitare) Rusty Day (chant). Après plusieurs albums, Cactus se sépare et Bogert et Appice s à nouveau disponibles rejoignent un Beck rétabli. Sans engagement, les trois musiciens commencent à travailler les titres de ce qui deviendra le mythique super groupe « Beck, Bogert Appice ». Dans la foulée de Cream, Deep Purple, Ten Years After, le trio joue un power rock psychédélique avec déjà, un son très lourd. Autour des compositions originales, une reprise « Superstition » co-écrite par Beck et Stevie Wonder autour de laquelle, les trois compères façonnent leur son. Et là, les choses sérieuses commencent. Dès lors, avec ces voix qui passent des notes basses aux hurlements stridents, ces guitares aux riffs épais et agressifs et un Carmine Appice qui charpente le tout, la formule est désormais la bonne. Du moins, c’est celle que retiendra l’histoire.
De cette période, sort un album majeur qui sera joué live comme l’attestent ces deux concerts enregistrés au Japon (1973) et Londres (1974). Le power trio dynamite les canons du rock, lui insuffle quelques harmonies boogie et blues pour devenir ce rock musclé, aussi violent que mélodique. Cheveux longs, fringues hippies et crasseuses, Beck Bogert Appice inventent aussi l’image du hard rock naissant. Maintenant, venons en au contenu. Ces deux live montrent le trio est sommet de son art. « Lose Myself With » est un brûlot funk rock dans la continuité de Vanilla Fudge avec cette puissante batterie qui martèle derrière. Sur « Going Down » ça défouraille comme chez Led Zeppelin avec cette rythmique soutenue par un Jeff Beck qui s’en donne à cœur joie à la guitare. Si « Sweet Sweet Surrender » est une ballade pop 70’s avec des chœurs qui s’élèvent au ciel comme des gospels, « Livin’ Alone » est un blues rock puissant à la Ten Years After, bourré d’adrenaline.Sur « Satisfied », rock du furieux lui à l’esprit Led Zeppelin, la basse syncopée rebondit dans tous les sens. « Lady » est une excellente composition avec là encore une approche très Cream dans le jeu,les roulements de fûts à gogo et la descente de basse. Sur « Black Cat Moan boogie », la section basse batterie est lourde, la guitare est bluesy à souhait. « Why Should I Care » est un boogie rock dans l’esprit Mott the Hoople avec un solo très particulier. Mention spéciale pour « Livin’ Alone » rock furieux tout en rupture de rythme où la guitare chante en réponse avec la basse. A l’écoute de ce titre, on comprend mieux où les ZZ Top ont tiré une partie de leurs influences. Alors qu’ils commencent à travailler sur un deuxième album studio, Jeff Beck quitte le groupe début 1974, entraînant sa dissolution définitive. Côté instrumentistes, si on cite souvent Keith Moon et John Bonham comme batteur de références, on oublie trop souvent de mentionner Carmine Appice. Ce quadruple CD inclue des photos d’archives, la réplique d’un poster et un livret incluant les notes de leur manager Bruce Pilato qui retracent en détails l’histoire de ce groupe météore. Ouvrez bien grands vos tympans, vous allez vous régaler.